Fossé citoyen-politique: ils ne comprennent pas...

Ce mercredi, j'étais invité à prendre la parole dans l'émission "A votre avis" en tant que co-fondateur d'un mouvement citoyen qui avait pris pas mal d'ampleur en 2017 avant de s'endormir doucement avant les élections communales de 2018 faute de moyens et de médiatisation.

Le sujet du jour était  "Mouvements citoyens: l'heure de la révolution?"

C'était la seconde fois que je pouvais m'exprimer dans une émission qui aborde les méthodes de dialogue entre citoyens et politiques et les possibilités d'influencer les décisions politiques pour ces premiers.
La précédente occasion datait d'il y a 15 ans et parlait du référendum !

Vous pouvez revoir cette émission en cliquant sur l'image qui représente pour moi le fait qu'en 15 ans, le temps a passé mais la prise en compte de l'avis du citoyen n'a pas évolué...


Maintenant, parlons du fond: il y a deux questions qui m'ont fait bondir durant le débat devant l'illogisme des affirmations avancées.

D'abord, une intervention de Laurette Onkelinx qui tenait à expliquer qu'elle restait citoyenne malgré tout et que la principale différence entre elle et une "citoyenne" était qu'elle était simplement plus "politisée".

Je pense que Mme Onkelinx est sincère.  Elle ne voit pas que parmi tous les citoyens, certains sont comme une île au milieu de l'océan et qu'ils ne voient même plus l'océan qui les entoure.

Sémantiquement, un citoyen est juste un individu considéré du point de vue de ses droits politiques.  Chaque électeur est donc bien un citoyen.  Par contre, si l'on prend  l'adjectif, c'est "Qui fait preuve d'esprit civique", soit qui tient compte, dans la pensée comme dans l'action autant et plus des intérêts de l'ensemble que des siens propres.  De ce côté, certains élus sont loin d'y satisfaire.

 

Déjà, si l'on regarde son parcours, Mme Onkelinx n'a jamais connu autre chose que la politique.
Fille d'un député-bourgmestre, petite fille d'un bourgmestre, élue députée à 29 ans, elle a été ministre pendant 22 ans.

Vu de l'extérieur, il est clair qu'elle ne peut savoir ce qu'est la vie d'un "citoyen" qui, à un moment de sa vie, a eu besoin de faire attention à ses dépenses en fin de mois.

Une "Gilet Jaune" invitée lui a bien expliqué la différence dans l'émission mais elle a du entendre cette remarque de nombreuses fois.
Il n'y a donc qu'une conclusion logique: les mandataires politiques qui n"ont jamais travaillé dans autre chose que la politique n'ont plus le sens des réalités.

C'est un principe courant: quand on demande à un européen du nord d'un milieu "moyen" - qui a tout le temps connu les systèmes de santé gratuits et les aides sociales - s'il est "riche", il répondra que non. Pourtant, si l'on compare sa vie avec celle de la majorité de la population en Inde, en Chine ou en Afrique, il est nettement mieux loti mais il ne s'en rend pas compte.
Il me semble donc possible qu'intérieurement, les gens qui vivent en dehors des moyennes soient intimement convaincus qu'ils sont "comme les autres".
Ce n'est pourtant factuellement pas le cas !  

Une autre intervention de la même intervenante (mais n'importe lequel des mandataires aurait sans doute pu la faire) m'a fait tiquer, car elle revient de manière récurrente dans la bouche de tous les mandataires qui avancent le fait que les électeurs auraient un pouvoir.

Cette phrase, c'est celle qui dit que "si les électeurs ne sont pas satisfaits d'un élu, ils peuvent le sanctionner à l'élection suivante".  Cette affirmation est soit remplie de mauvaise foi, soit d'une vision de la politique décalée de la réalité.


En effet, ils savent tous très bien que la majorité de la population ne s'intéresse pas à la politique et donc, qu'à part dans le cas de malversations jugées par la justice (à supposer que cela arrive avant la prescription), la faible qualité du travail d'un élu n'est jamais réellement mise en avant lors de la campagne suivante ou en tout cas a un faible impact.

Ensuite, la particratie fait que même un élu qui serait déjugé par une partie de ses électeurs pourra toujours bénéficier d'une position intéressante alternative via son parti et pourrait être réélu, même en étant sanctionné en terme de voix.

Enfin, comme l'élu ne peut être sanctionné en cas de travail insatisfaisant durant son mandat, s'il sent que se représenter au même poste n'est pas crédible, il pourra toujours briguer un autre mandat qui lui assure de poste en poste une carrière complète en politique.

Un exemple (dont toute ressemblance avec une personne existante serait fortuite): imaginons une personne qui promet de ne pas cumuler lorsqu'il se présente à une élection. Après être élue, elle renie sa parole et se présente à l'élection suivante et cumule.  Ceux qui avaient voté pour lui sur la promesse de décumul ne peuvent pas changer leur vote avant la fin du mandat.  Bref, mentir par omission permet toujours de prolonger sa carrière.

En résumé, s'il y avait transparence totale, interdiction de cumuls à un temps plein par personne, limitation du nombre de mandats dans le temps (avec filet de sécurité pour la sortie) et d'autres règles qui permettraient à un élu d'être un simple citoyen qui passe une période de sa vie dans une fonction politique et plus un professionnel devant faire des compromissions pour "garder son job", la démocratie ne s'en porterait que mieux.   

Et pourtant, ils semblent ne pas écouter, ou ne pas entendre ces arguments...

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